14/04/2009
Gary et moi
C'est Besson qui rapporte ce témoignage de la première femme de Gary ("Romain, un regard particulier"):
" D'une façon générale, il y avait peu de choses qui lui plaisaient : le sexe, les blinis, nager dans la mer et, bien sûr, ses écrits. Pour des motifs les plus futiles, ajoute Lesley Blanch, des factures ménagères, une chaussette perdue, sa santé (...), il avait l'art de créer autour de lui un climat dramatique et frémissant".
Moi, c'est pareil pour la chaussette.
15:50 Publié dans Manhattan transfer | Tags : littérature, romain gary, patrick besson | Lien permanent | Commentaires (2)
26/10/2007
L'exfiltration du guerrier viking en terres australes via la gare de Rouen
Il fallait s'y attendre. Le résultat lamentable de ce périple en tous sens entre l'Europe, l'Amérique, l'Asie et l'Océanie, ces dernières semaines, c'est un ensemble de rêves abracadabrantesques qui s'emmêlent les pinceaux en une sorte de conte féérique et guerrier.
Moi qui ne me souviens presque jamais de mes rêves (ce qui, paraît-il, signale des songes pervers, rien moins, j'avais bien besoin de ça), j'ai pris le parti d'en noter quelques bribes sur un petit carnet de nuit ramené de l'Intercontinental d'Hong Kong.
C'est pas moi qui l'ai piqué, le carnet.
Du coup, on verra bien si c'est aussi pervers que ça ; d'ailleurs, si ça l'est vraiment - je prends bien déjà quelques libertés avec le casting -, je commettrais quelques petits arrangements au montage.
Ça a commencé l'autre nuit. Je me retrouvai propulsé à la tête d'une bande de Norvégiens sanguinaires - le chef répondait au nom, tout à fait inattendu, de Knut -, qui s'apprêtaient à faire main basse, non sur la schnouf, mais sur la Normandie.
Un réalisateur northumbrien en difficulté aura sans doute pensé à un remake facile en forme de comédie musicale sur le thème plein de fraîcheur : "J'irai revoir ma Normandie " pour se relancer à travers un partenariat, sponsorisé par Media Plus, entre la Svensk Filmindustri et les Caudebec-en-Caux Cruise.
On a beau dire, on sent une indéniable accélération - oserais-je dire un nouveau souffle ? - sur le plan culturel, depuis l'approbation du Traité simplifié. Qu'est-ce que ça va être après la ratification, les enfants.
Le problème, c'est que tout ce petit monde gueulait vraiment très fort en attendant le prochain Intercités, en anglais - ce qui relativise clairement tout ce que notre vision des hordes du Nord pourrait véhiculer de primitif -, et dans le hall de la gare de Rouen en plus, qui résonne beaucoup comme hall, on dirait une cathédrale.
Et puis, la nuit dernière, vous allez rire - du moins, ceux qui, me connaissant un peu, savent combien j'ai su conserver une certaine sobriété de moeurs en dépit d'une carrière fulgurante et de sollicitations aussi multiples que décousues -, je me retrouve en prince perse, peut-être wahhabite, circulant majestueusement dans une sorte d'immense salon zen.
On aurait dit le deuxième étage du Metropolitan de Bangkok sur Sathorn Road, dédié à tout un tas de soins chics et bienfaisants. A moins qu'il ne se soit agi des installations de l'Athletic Club de Columbus - un club huppé, niché dans un vénérable building de briques rouges sur Broad Street, que nous nous apprêtons à rejoindre ; du moins que nous nous apprêtions à rejoindre avant qu'il y en ait un qui ne tombit, que dis-je, qui ne chutassions sur la petite ligne qui précisait les admission fees s'ajoutant aux cotisations mensuelles, ainsi qu'aux frais de parking, de coaching et de fooding.
Là, en peignoir, je déclare humblement à deux jeunes journalistes calédoniennes qui m'entourent, tandis qu'une maîtresse de jeunesse, aussi saxophoniste que dévergondée, me guette d'un peu plus loin, que je m'en vais prétendre au Goncourt chez Flammarion. Sur ce, dans un rêve désespérément borné au plan de la géographie comme en une sorte de résistance sourde et bien campée à cette longue suite d'escales, je me prépare à (re)prendre le train pour, devinez quoi, aller (re)voir ma Normandie.
Je ne sais pas qui est le trouvère souffreteux qui a inventé la chanson, mais je ne serais pas fâché que Knut et sa bande - et cela même, rétrospectivement, dès les premières descentes historiques sur Villequier, un peu comme Jim Caviezel par Denzel Washington dans Déjà vu -, le zigouillent une bonne fois pour toutes. Ça m'ouvrirait des horizons sur le plan onirique. Et puis ça éviterait des tas de morts inutiles sur le Mississipi, en plus.
19:25 Publié dans Sweet dreams | Tags : voyages, rêves, Nouvelle-Calédonie, Europe, politique, littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
09/10/2007
Tropique de la catastrophe (ouverture)
Une nouvelle idée de roman s'est imposée ces derniers jours et, plus encore, ces dernières nuits, au cours de mon périple en Asie, reléguant la précédente, moins ancrée, à de meilleurs auspices (elle avait une entrée indéniable, mais manquait encore d'une gravité propre).
L'Océanie l'emporte sur l'Amérique ! C'est à la fois étonnant tant je me sens américain de bonne foi, et sans surprise parce que je suis bien davantage né une seconde fois il y a quinze ans dans le Pacifique que je n'aurais pu mourir, bêtement, il y a peu en Amérique - mais ce n'est pas fini, il est vrai, j'ai vu comme tout le monde que ça continuait à canarder dans les bourgs du Wisconsin. C'est donc la vie qui l'emporte dans une voie qui s'annonce pourtant délétère.
Cette idée est enracinée dans des images anciennes. Je crois qu'elle a grandi aussi entre deux escapades, l'une en Afrique (la Lettre à D., son inverse), l'autre en Asie-Océanie (en dérivant sur Alabama Song). Et puis aussi autour de deux ou trois pages de l'Extension, il y a quoi, cinq ans peut-être, dans un petit hôtel de passage à Paris, en remontant d'Océanie justement, du côté de Saint-Julien, à deux pas de l'ancien emplacement du Fogon.
En fait, c'est plus compliqué, car elle en recouvre une, plus ancienne encore et qui fait l'objet, dans un registre différent, d'une focalisation similaire, et une autre, plus récente elle, qu'avait précisément révélée la magnifique Lettre à D, qui m'avait éblouie, lors d'un instant volé dans le recoin d'un bungalow de Moanda, peu avant une cérémonie officielle.
C'est un enchevêtrement en somme, mais dans lequel s'est ouverte une brèche d'attaque - une attaque à l'acide, peut-être.
Je manque de temps. Il me faudrait ici, à Hong-Kong, m'immerger dans la ville, écrire, et en même temps poursuivre, ou reprendre, mes lectures. Je repense à Sartre, les amphètes des dernières années - seule issue pour accorder le mouvement de la pensée à la vitesse de l'écriture sans perdre le fil de l'action.
Je décide aussi d'entreprendre simultanément le texte et son commentaire ; cela, bien que j'eusse trouvé détestable la conclusion égotique d'Alabama Song. Un ridicule épilogue de donzelle qui exhibe une clé dont on se moque. Imagine-t-on Barthes passer aux aveux à la fin des Fragments ? car, quoi, c'est bien de cela dont il s'agit, beaucoup plus que de je-ne-sais-quel making-off à la noix de ce roman dont la puissance poétique déglinguée se suffisait à elle-même. Le texte et son commentaitre donc, mais séparés.
Nous verrons bien à quoi cela va nous mener. Après tout, une ouverture, ce n'est pas un essai. Même sans transformation pourtant, il en resterait un mouvement, assez conforme en tant que tel à l'une des vocations exploratoires de ces cahiers ouverts.
06:48 Publié dans Tropique de la catastrophe (commentaire) | Tags : littérature, roman, Asie, Afrique, Alabama Song, Lettre à D, Barthes | Lien permanent | Commentaires (0)
12/07/2007
Ray's Gang (une amitié, ça n'a pas de prix)
Ray a débarqué un matin à la maison, deux heures avant le rendez-vous convenu. C'était un samedi. Il faisait déjà chaud, même à l'ombre des platanes. Je l'avais appelé la veille. Il avait déboulé aussi sec, dans un gros 4x4 Ford gris métallisé - on aurait dit un modèle 150, peut-être même plus puissant. Deux gars suivaient de près dans une vieille Chevrolet rouge, sérieusement attaquée par la rouille.
"If your are looking for someone to haul your items at an affordable price, call Ray at...". Suivait son numéro, bien en évidence sur le petit prospectus rose - une attention délicate, quoique légèrement à contre-emploi - qui avait été coincé sur les essuie-glaces des voitures du quartier. Le papier précisait : "No items is too big or too small, Ray's Hauling will haul anything at anytime".
Un sésame faisait office de conclusion : "Ray's Hauling is well known in the German Village area". Vu la tête effrayée que firent promeneurs et voisins autour du chargement, je doutais sérieusement que la bande soit venue avec la recommandation des alentours. Ou alors ce devait être plutôt de l'Est de Parson, de l'autre côté de German, là où commence le ghetto.
Au téléphone, Ray avait bien marmonné quelques mots, et donné l'impression d'écourter la conversation autant que possible, une fois le rendez-vous fixé. Bourru, mais dispo. Appeler le boss d'un gang local pour expédier quelques vieilles affaires à la décharge, ce n'était sans doute pas l'idée la plus lumineuse que j'aie eue depuis notre arrivée dans le quartier. Mais c'était la seule que j'avais sous la main, et elle avait l'air honorable - du moins, avant que Ray ne se pointe à la porte avec ses gars. Je ne sais pas pourquoi : ils donnaient l'impression d'avoir envie d'en découdre.
Il a fallu vite s'adapter. Les types commençaient à charger ce que je leur avais indiqué à la volée avant que nous n'ayons commencé à discuter du prix de l'enlèvement. Quand j'ouvris la discussion sur le sujet, Ray commença par mettre la barre assez haut compte tenu des "frais incompressibles" de dumping qu'il avançait. Et l'addition cavalait naturellement au-dessus de ce seuil. Je faillis mettre fin illico au deal. Mais je me ressaisis assez vite. Le planter là, à peine débarqué, avec ses gars, c'était prendre le risque de le mettre de très mauvaise humeur. Ray - un colosse black assez large, avec une tête de boxeur aplatie -, n'avait pas l'air d'un type commode, et ses copains ne déparaient pas dans le portrait d'ensemble.
Une fois les lieux repérés, et vu l'allure de la bande, rien ne l'empêchait de repasser une autre fois, à la fraîche, la maison vide - ou vidée après son passage. Non, le mieux était encore de conclure le deal, et dans des termes qui lui paraîtraient décents. J'en profitais, du coup, pour charger franchement la barque et lui refiler tout ce qui, depuis le déménagement, était de trop. Enormes bacs à fleurs qui pourrissaient sur place, gros paquets cartonnés d'objets inutiles, tas de briques et de cailloux, vieilles moquettes arrachées pour la circonstance - bon débarras avant d'attaquer le parquet -, morceaux de bois, déchets en tout genre... Il ne serait pas venu pour rien.
Au prix convenu, Ray s'était détendu. Il avait même commencé à m'entretenir de Roland Garros - j'ai mis un peu de temps à capter de quoi il voulait me parler avec son "Raïn'Gross" -, et de deux ou trois choses qu'il avait en tête à propos de la France. Mais il s'est vite rembruni en voyant le Chevrolet déborder de tous les côtés. Comme ses gars suaient à grosses gouttes dans les allées-et-venues entre l'étage et la benne, et que Ray insistait lourdement sur la pénibilité de la tâche, je lui rappelais tout de même la différence entre ce que j'allais leur verser et le salaire minimum en vigueur chez l'Oncle Sam. Mais cela ne fit que détériorer un peu plus l'ambiance.
Une fois le foutoir entassé dans la benne, le jardin éclairci et la maison nettoyée, il était temps de conclure. Ne restait plus qu'à avancer la monnaie. Et là, problème : pas de cash à la maison. Ce n'était apparemment pas le genre de mes nouveaux amis de prendre les chèques ou de sortir le week-end avec une machine à carte bleue. Je devins vert. Et Ray aussi tendu tout à coup que ses gars, en nage devant l'entrée, avaient le regard noir. Je sentis qu'il fallait trouver autre chose qu'un argumentaire, même bien ficelé, pour se sortir de ce coup-là.
Finalement, je proposai une escapade commune à la Huntington Bank la plus proche. Ray accepta de mauvaise grâce et me colla de près avec sa Ford sur le trajet, pendant que la Chevrolet prenait le chemin de la décharge. Je crus les avoir perdus à l'approche de la banque, à la faveur d'un feu rouge qui coupa le convoi. Mais Ray reparut aussi sec, et vint s'intercaler entre la Jeep et l'entrée. Je finis par ressortir quelques instants plus tard avec l'argent. Ray et l'un de ses gars, lunettes de soleil méchamment enfoncées sur le visage, commençaient à s'impatienter sérieusement, calés dans la pénombre de la cabine. Des accélérations répétées faisaient rugir le moteur.
Je marquai un temps d'arrêt, le fixai. Puis je m'approchai et tendis lentement l'enveloppe à travers la vitre en surveillant les mains des gars à l'intérieur. Ray pris l'enveloppe sans un mot. Puis la Ford démarra sur les chapeaux de roue et disparut à l'angle du bâtiment avant de reparaître près de l'autre aile en s'engageant, d'un virage sec, dans High Street.
A ma surprise, Ray, qui avait encore tenté de surenchérir avant de me filer le train à la banque, n'avait pas compté les billets. Il est des conventions inutiles : c'est le privilège des grandes amitiés. Et celle-là en était bien une, où je ne m'y connaissais pas en étrennes.
15:16 Publié dans Du rififi chez les Yankees | Tags : bande, argent, ghetto, littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
16/04/2007
Free Style (5) Haute voltige
Techniquement, il n'y a rien à redire. Mais quid en cas de problème - une turbulence de dernière minute, un déséquilibre imprévu, un problème matériel ?
Lorsque je pars pour le septième saut, j'ai conscience de l'enjeu. Mais je n'évalue pas bien la nécessité brutale du test qui en découle. Mi-réflexe, mi-répétition, au cas où, je refais une ou deux fois le geste du secours. Libérer le regard de l'horizon, le fixer sur la poignée de gauche, la saisir à deux mains, tirer fort pour larguer la voile principale et, dans la foulée pour éviter un déséquilibre qui obligerait à ouvrir en mauvaise posture, attrapper celle de droite et libérer le secours.
C'est reparti.
Après m'avoir laissé accomplir la série d'enchaînements programmés, à mi-chute, Dobski descend en flèche serrée comme une bombe et vient se placer, au cordeau, face à moi. Je suis bien, très stable après un piqué rapide. Je ne me souviens encore que de son sourire. Je crois à une seconde fraternelle...
Je ne vois pas le coup venir.
D'un coup, je pars en vrille sans comprendre d'où vient le problème. Et surtout, sans rien maîtriser du dérapage. Balancé violemment à droite, à gauche, en avant, en arrière, à l'endroit, à l'envers, je valdingue dans l'espace, je n'ai plus aucun point fixe en ligne de mire. Ni stabilité, ni repères. Une affaire plutôt mal engagée.
La seule chose que je sais, que je sens physiquement, c'est que je n'ai que quelques secondes - dix peut-être, quinze au plus - pour rétablir la position et préparer l'ouverture. Et ces secondes infernales, comme scandées par un métronome implacable, défilent à une vitesse ahurissante.
Une scène hollywoodienne de déminage, dans un (très) court-métrage : quelqu'un a enclenché le compte à rebours, je joue le rôle de la bombe, le réalisateur s'est fait la malle et un type me crie : ce n'est pas un film.
Réserve sérieuse sur le happy end.
Concentré sur ma tentative de retrouver un peu de stabilité, je ne peux jeter un oeil à mon altimètre. Mais cette impossibilité-même amplifie la sensation mêlée de désordre et de vitesse. Je dois passer 1500, bientôt 1200... 1000 mètres en trombe.
Et toujours en vrac.
Au sol, les visages se tendent en commençant à distinguer clairement un point bleu descendre comme une comète, sans l'ombre d'un début d'ouverture. La limite réglementaire est à 700. Les secondes, précieuses, passent, et je continue à enchaîner tonneaux sur tonneaux, dans tous les sens, comme un coureur éjecté d'un hors-bord.
Soudain, je comprends que c'est moi qui alimente ce maelströem. Je cesse de me battre sur tous les fronts en même temps. Un très court instant, je me laisse porter par cette chute folle. Renoncer à la maîtrise à tout prix, jouer avec le mouvement. D'un coup de rein, je crée un brusque déséquilibre avec le vent pour me rétablir in extremis sur le ventre.
Pas encore tout à fait stable. Je m'en fous. C'est suffisant pour ce que j'ai à faire ; pour la perfection, on verra plus tard.
A peine la position retrouvée, j'arrache le hand deploy comme une brute. La voile se gonfle instantanément au vent. Un coup d'oeil en remontant au sol qui, enfin, semble s'éloigner un peu. Et tout de suite un autre, en sens inverse, vers le haut.
Vers la voile.
Quelques instants de doute face à un début de torsade. Je pédale dans l'autre sens pour inverser le mouvement... Après une seconde ou deux d'inertie, les suspentes retrouvent en quelques tours une position normale, droite et équilibrée sous la voile.
Reste la sangle droite, qui me paraît anormalement détachée. A trente centimètres environ au-dessus de l'épaule, j'ai l'impression que le harnais peut décrocher... Tant pis, on fera avec, tout doux. Je compense en me calant progressivement de façon plus serrée sur la partie gauche du harnais.
Pas de gestes brusques. Respirer avec la voile. Des virages au millimètre. Manipuler le parachute comme si j'avais le paquetage blindé de nitro. Laisser filer, manoeuvrer au strict minimum.
Je me laisse descendre vers le terrain, concentré sur un mouvement fluide et précis pour se caler tout de suite sur la manoeuvre d'approche.
C'est fini.
Si ça se trouve, il a eu un aïeul massacré dans une bataille napoléonienne. Ce cosaque vient de me passer, à quelques secondes de l'ouverture, une planchette japonaise à 250 km/h. Et moi je viens de passer à côté du crash, et du solo à suivre. Le pire, c'est qu'il a eu raison, Dobski.
Je me mets à douter.
Partie remise ?
19:10 Publié dans Petit traité de gravitation appliquée | Tags : récit, littérature, aventure | Lien permanent | Commentaires (0)