24/04/2007
Pourquoi Columbus ? (Desperate Housemen)
"But... what brings you here ?" nous lança le vieux mécano incrédule, sapé comme un farmer dans un film de Raoul Walsh, sur le parking de Chagrin Drive, un dimanche après-midi, lorsque nous lui avons dit que nous venions de Paris. Pareil pour le caissier de chez Trader's Joe, l'esthéticienne d'à-côté, la responsable immobilière de Short North - et j'en passe.
Pas mieux au bureau. D'ailleurs, il faut bien dire que, moi aussi, ça a été ma première réaction : "Euh, Columbus, t'es sûre ma chérie ? On va peut-être réfléchir un peu, d'abord, non ?".
Cause toujours (t'avais qu'à pas choisir une aventurière).
Bon, reprenons. Columbus, c'est d'abord le siège d'Abercrombie & Fitch, grande marque américaine de vêtements, que rejoint Anny pour aller tailler des croupières à la concurrence sur le marché de la lingerie. Quel siège d'ailleurs ! conçu par Anderson à base de matériaux design et de grands espaces lumineux, au beau milieu de l'immense domaine forestier de New Albany.
Bluffant.
On dirait une sorte de secte hype d'un nouveau genre, quelque part entre le Seigneur des anneaux (sans les Hobbit), une pub Hollywood et le campus de Stanford.
C'est aussi une ville de l'Ohio en plein développement, avec près de deux millions d'habitants, à laquelle L'expansion d'octobre a consacré une pleine page sur le thème "Columbus, reflet de l'Amérique". Alors que toutes les grandes villes du Midwest, comme Cleveland, Chicago ou Détroit, voient, notamment du fait de la crise du secteur automobile, leur population décroître, Columbus témoigne d'un dynamisme indéniable, avec une croissance économique d'environ 3 % par an depuis 2000.
Procter continue d'y faire ses tests marketing (and so does Abercrombie) et Honda s'y installe, à côté de nombreux autres sièges sociaux de grandes multinationales, notamment dans le domaine des assurances et de la finance.
Surtout, l'Université d'Etat de l'Ohio, la deuxième faculté du pays avec plus de 50 000 étudiants, entraîne dans son sillage des centaines de centres de recherche et autres start up dans le domaine des hautes technologies - une pépinière, à mi-chemin de New York et de Chicago.
C'est enfin une ville traversée par l'Ohio, entre grands buildings d'affaires des années 30 downtown et quartiers plus européens, comme German, Italian, Victorian villages, ou Short North - sans parler de zones plus résidentielles à Granville ou Bexley.
On dirait le camp de base de Desperate Housewife... ça tombe bien, on va peut-être réfléchir à une version masculine d'un truc de ce genre avec mes nouveaux potes abandonnés à eux-mêmes de ce nouveau business women's club.
04:14 Publié dans Du rififi chez les Yankees | Tags : Columbus (Ohio), Abercrombie & Fitch, L'Expansion, Desperate Housewife, université, haute technologie, recherche | Lien permanent | Commentaires (0)
10/04/2007
Zénitude (le problème avec la quarantaine)
Tout allait bien, jusqu'à ce que je tombe sur ce papier de L'expansion l'autre jour intitulé "Négocier les virages de chaque âge", chapitre "redonnez-vous de l'élan" la quarantaine venue. "40 ans, c'est l'âge où la maturité fait craindre la calcification, résume avec humour Yves Desjacques". Voilà qu'ils se croient drôles maintenant à L'expansion.
Si la calcification désigne "l'infiltration par des sels de calcium de tissus ou organes qui n'en contiennent pas normalement" (Petit Robert), pourquoi ça ne toucherait pas le cerveau ? Je veux dire, le calcium, il va bien finir par trouver où il se cache, un jour, le cerveau ? Je préfère le prévenir tout de suite : vu ma tendance à fonctionner avec un seul hémisphère, ce n'est pas gagné. Par exemple, à Questions pour un champion, je n'ai jamais pu dépasser deux bonnes réponses d'affilée ; et encore, il fallait que ça porte sur des questions d'histoire très connues, comme le cheval blanc de Rocky IV.
Il est peut-être trop tard, finalement.
Poursuivons, malgré tout, la lecture de ce passionnant article. "La mise en orbite de sa carrière étant en principe derrière lui (aïe, mais je ne suis sur l'orbite de rien du tout, moi, les gars, je vois bien de temps en temps d'autres planètes sur Encyclopedia, mais ça s'arrête là), le quadragénaire doit solidifier sa trajectoire" (couper des arbres dans l'Ohio, ça le fait comme solidification ?). "Tout en n'évitant pas les questions dérangeantes" (on n'a pas déjà fait le tour, là ?) : vais-je faire le même métier toute ma vie ? (bûcheron pendant trente ans, ça va pas non ?) Ne devrais-je pas tenter une mobilité internationale ?
A la bonne heure, enfin une idée brillante.
"Il s'agit, poursuit le journal, de la transition professionnelle la plus délicate pour le cadre (délicate ? mais je me sentais d'une zénitude mêlée d'audacitude à toute épreuve avant de lire cet article, moi). Celui-ci éprouve souvent le sentiment d'être positionné sur des rails le menant tout droit jusqu'à sa retraite (ils ont un partenariat avec La vie du rail à L'expansion ou quoi?). D'où une certaine angoisse existentielle qui peut le saisir au moment de faire le bilan de la fameuse mi-vie, confirme le coach Thierry Chavel".
Mais il me connaît d'où, lui, Thierry Chavel ?
Ça porte un nouveau nom d'ailleurs ce syndrôme : la "middlescence aiguë", contraction de middle age et adolescence (Morison, Erickson & Dychtwald, in Harvard Business Review, mars 2006). C'est comme enfant gaté, mais sans le gâteau. Et ce ne serait pas une chimère : près des deux tiers des 7700 salariés de 35 à 55 ans interrogés par les auteurs ne se sentiraient plus "énergisés" par leur travail, et un sur trois aurait le sentiment d'être dans une impasse. En somme, il faut choisir : devenir un leader, se droguer. Ou aller en finale de Questions pour un champion.
Heureusement, il y a mon ami Byron, un canadien rencontré il y a vingt ans dans un cercle universitaire international - et que l'on pourrait bien retrouver Premier ministre du Canada d'ici quelques années - qui m'a remonté le moral, dans son dernier mail. D'abord, en plaçant d'emblée cette expatriation à son vrai niveau: "Ton séjour américain sera excellent pour les rapports franco-américains, globalement". Traduisez: le prochain discours à l'ONU, c'est pour toi (surtout peut-être dans le cas où je serais en finale avec Besancenot). Il est comme ça Byron, il m'a toujours vu exercer de hautes responsabilités politiques. Il faut dire qu'à vingt ans, on s'était faits élire comme délégués de ces forums étudiants par une sorte d'assemblée générale internationale et, depuis, ça nous est un peu monté à la tête.
Il poursuit : "Columbus, ça va, il a une masse critical de commerces, et il est un vrai ville américaine, donc il sera un bon expérience cultural". Ouf. "Il y a un enorme université, donc beaucoup de jolies jeunes filles". Ah oui mais là, non Byron. Quelle folie, quand j'y repense, ce concept de grands raouts étudiants internationaux, je ne dis pas du point de vue de la coopération entres les peuples - sous cet angle, ça créait des liens indéniables-, mais de celui du progrès de la recherche fondamentale.
D'ailleurs, il corrige tout de suite - il est très bien ce garçon : "C'est formidable que tu peux être flexible avec ta carrière pour suivre ton femme" (il prononce toujours "feum" ; et, c'est plus fort que lui, il le met toujours au masculin, c'est quand même un drôle de pays le Canada). Ah ça, c'est rien de le dire. Flexible, c'est la traduction pour kamikaze en yankee ? Parce qu'en fait de le négocier, je le passerais plutôt tout droit comme une brute, moi, le virage de la quarantaine.
07:05 Publié dans De l'employabilité en période de tempête | Tags : l'expansion, management, quarantaine, angoisse existentielle, byron | Lien permanent | Commentaires (0)